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Raid sur Moscou

Le 27/06/2023

Dans Actualités

On prête à Rudyard Kipling d’avoir écrit que « la première victime de la guerre est la vérité ». S’il en va ainsi, alors le bon sens vient tout de suite après. En effet, dans cette guerre de nouvelle génération, où le champ de bataille se situe dans nos esprits mêmes, le bon sens est mis à rude épreuve. Les difficultés à se représenter les forces hostiles et celles favorables, la difficulté à cerner les dessous des événements que nous traversons, la difficulté à percevoir certaines fake news des médias de grand chemin, toutes ces difficultés embrument nos esprits, et bien malin celui qui a d’emblée réponse à toutes les questions.

Lorsqu’on se tourne vers les alerteurs pour prendre la température de la situation, nous avons tous les sons de cloche possibles. Les uns, comme Jean-Jacques Crèvecœur, sont d’un pessimisme assumé. Ils ne croient en aucune force d’envergure susceptible de contrecarrer les plans mondialistes. Pour eux, l’Alliance militaire évoquée dans ces colonnes n’existe pas, qui pourrait agir en sous-marin et conduire le mondialisme à sa perte. Trump est une chimère qui s’agite pendant que Schwab, Gates et Soros se déchirent les lambeaux de notre civilisation. L’agitateur d’idées envisage sérieusement notre défaite, mais il se dit aussi qu’avoir combattu contre nos ennemis aura été un honneur pour lui. Quel espoir met-il dans une heureuse issue ? A peu près aucun. De là à baisser les bras, il n’y a pas loin.

Et puis il y a les inconditionnels de l’Alliance, ceux qui pensent que la résistance a déjà gagné, que ceux, qui agissent de façon souterraine et qu’on nomme les Chapeaux blancs, ont la situation bien en mains et contrôlent la démolition programmée de l’Etat profond à travers le monde. Pour eux, ce qui se déroule actuellement relève d’un immense spectacle. Dans le camp des optimistes, on trouve les compagnons de route Cuttita, Victor et quelques autres.

Entre ces extrêmes, et n’ayant pas pour ma part la science infuse, je suis ballotté par les événements comme tout un chacun, essayant de les décrypter au moyen de ma seule raison et des facultés cartésiennes qui me restent. Trop d’informations me demeurent cachées, en effet, pour que j’aie une vue d’ensemble satisfaisante. Trop d’événements, dont on ignore les tenants et les aboutissants, comme l’épisode du porte-conteneurs Evergreen, trop de mises en scène comme l’investiture de Joe Biden, trop de retournements comme la déroutante participation de Lula et Rousseff aux BRICS, trop de faux drapeaux comme le 6 janvier 2021 au Capitole ont émaillé la politique internationale depuis 2020, brouillant toute analyse rationnelle.

Coup d etat du 24 juin 2023

Nous en étions là ce samedi, lorsque débuta la folle journée du 24 juin. On apprend tôt en début d’après-midi, dans tous les médias de connivence, trop heureux d’assister en direct à la chute de Poutine, que les forces paramilitaires du groupe Wagner auraient encerclé le QG du district militaire russe à Rostov-sur-le-Don. Prigojine et ses hommes videraient les prisons et enrôleraient les prisonniers dans leurs rangs. Le Parisien s’en réjouit ouvertement au point d’enterrer déjà le maître du Kremlin. Le journal écrit que la rébellion de Wagner est « une preuve de la faiblesse du régime de Poutine ». Il y voit « le résultat de mois de pourrissement ». Mais expliquez-moi comment Poutine pourrait-il être si faible et, il y a peu encore, si puissant dans la bouche des mêmes journalistes ? Il faudrait savoir ! Passons. Le Parisien, toujours lui, feint ensuite de s’apitoyer sur le sort de Poutine en rapportant que celui-ci parle de « trahison » de la part de ce proche qu’est censé être Evgueni Prigojine. Tu quoque mi fili ! Le Parisien jubile à l’idée de « ce coup de poignard dans le dos ».

Puis la nouvelle tombe que Poutine aurait fui Moscou et que les Wagner marcheraient sur la capitale russe. A cet instant, non seulement j’ai du mal à concevoir que le tombeur de Bakhmut a aussi vite changé son fusil d’épaule, mais encore comment est-il possible qu’il se mette en marche vers Moscou dans la foulée, à plus de mille kilomètres de là ? La géographie n’est-elle donc plus un obstacle à l’avancée d’une armée ? Les mondialistes voulaient tant que le putschiste s’empare de Moscou que pour eux c’était aussitôt dit aussitôt fait. Prigojine devait être arrivé le jour même à Moscou, avoir pris la ville d’assaut, si possible dans un bain de sang et peut-être même avoir jugé, condamné et exécuté Poutine. Cependant, comment le mutin Prigojine pouvait-il foncer sur Moscou en empruntant l’autoroute sans être arrêté net par la force de feu aérienne russe ? L’armée russe était-elle à ce point tétanisée qu’elle ne répondait plus au tocsin ? D’ailleurs où était-elle passée ? Envolée, volatilisée, semble-t-il ! Qui plus est, le rapport de forces ne pouvait jouer en faveur du chef du PMC, compte tenu de ses 25000 mercenaires face aux centaines de milliers de soldats de l’armée régulière équipés d’armes qu’on ne cessait de vanter. Non, tout ce narratif ne tenait décidément pas debout. Tout était cousu de fil blanc.

Carte rostov moscou

Mais les médias poursuivaient leur folle divagation. A les en croire, Moscou se barricadait déjà. La ville se préparait à l’arrivée de Prigojine. Et dire que lui, la veille encore, l’horrible mercenaire à la solde de Poutine, devenait leur héros en fomentant son coup d’état. Bientôt on annonce que le héros a rejoint Elets, une ville à 350 km de Moscou. Ses hommes filent à une cadence infernale, presqu’irréelle. D’ici qu’on nous dise que le trafic est fluide dans ce sens sur l’autoroute M4 qu’il emprunte, il n’y a qu’un pas. On justifierait ainsi l’avancée éclair du chef de guerre. Pendant ce temps-là, le Kremlin se mure dans un silence de plomb. Le monde retient son souffle. La Russie est-elle au bord de la guerre civile ? Moscou va-t-elle tomber, comme jadis Stalingrad aurait dû le faire face au général Paulus ? Après tout, pour des nostalgiques du nazisme, le nom de Wagner conviendrait très bien pour symboliser la chute de Moscou. Les réseaux sociaux laissent même entendre que Prigojine a atteint les faubourgs moscovites.

Sur BFM, une journaliste russe de complaisance, sollicitée pour la grande occasion, affirme déjà que « nous assistons aux derniers jours de Poutine en tant que président de la Russie ». Fogiel, dans sa tour d’ivoire, exulte. Peut-être même a-t-il annoncé la nouvelle en primeur à l’Elysée. The Telegraph est lui aussi affirmatif : « c’est la fin de la route pour Poutine ».

On évoque des pertes, dérisoires au demeurant, dans les forces aérospatiales russes sans même savoir comment elles ont eu lieu ni où. Les rumeurs les plus folles s’enchaînent. Prigojine aurait été contraint d’agir suite à une tentative d’assassinat. On parle de lutte de pouvoir entre lui et Shoigu, le ministre russe de la Défense. Mais aussi de pourparlers secrets entre lui et les ukrainiens. Enfin le biélorusse Loukachenko entre dans la danse. Il se serait entretenu tour à tour avec Poutine et Prigojine, leur offrant ses services pour un règlement à l’amiable de cette rivalité.

Prigojine parmi ses hommes

On en était là, submergé par des nouvelles toutes plus échevelées les unes que les autres, toutes en un laps de temps ridicule, lorsque tomba la bombe : Prigojine acceptait de stopper l’avancée de ses troupes. Il acceptait la proposition de Loukachenko. La désescalade était amorcée. Le coup d’état était finalement un coup d’épée dans l’eau. Poutine pouvait retrouver son fauteuil au Kremlin. La déception était à son comble dans les salles de rédaction et sur les plateaux tv. Wagner appelait ses combattants à arrêter la mutinerie. En France, la journée s’achevait laissant les mainstream dans un affreux désarroi.

Ces corniauds de journalistes et de commentateurs ne se seront posé aucune question, tant leur parti pris les aura aveuglés. Il faut être BHL pour avoir cru que « le destin [était] en train de basculer ». L’adepte de Lucifer se consolera sûrement avec quelque stupéfiant et de futures guerres à attiser. Jusqu’au bout pas une question ne les aura effleurés. Comment Loukachenko, un acteur de second plan, avait-il réussi à enrayer le coup d’état à lui seul ? Comment ont-ils pu imaginer que Prigojine arrêterait son convoi sur la route et ferait demi-tour ? Fait-on demi-tour sur l’autoroute ?

Bhl coup d etat prigojine

Depuis cette folle journée, beaucoup ont remis de l’ordre dans leurs idées et ce qui prévaut à cette heure est que nous avons assisté à une opération psychologique, montée de toutes pièces, pour faire sortir les ennemis du bois. Pour se débarrasser des éléments déloyaux en Russie comme peut-être Shoigu, peut-être encore pour redéployer des forces en détournant l’attention ailleurs, mais aussi pour induire en erreur le camp ukrainien qui aurait pu vouloir profiter d’un prétendu état de faiblesse de Poutine pour pousser ses pions sur le terrain. L’avenir le dira. Des commentateurs avisés que ce soit au Cercle Aristote, sur Réseau International, Radio Courtoisie ou Radio-Québec, ou encore que ce soit Idriss Aberkane, ont pour la plupart privilégié cette interprétation des faits. Toutes les autres ne résistent pas au bon sens le plus élémentaire. Alexis Cossette va jusqu’à qualifier le raid sur Moscou de « spectacle ». La seule explication plausible est celle d’un piège tendu par le pouvoir russe. Autant d’événements à la fois ne pouvaient qu’être un leurre télévisuel et ce putsch un scénario rocambolesque. La journée fut aussi surréaliste que son dénouement miraculeux. Au moins, ce que l’on peut dire sans trop s’avancer est que les médias corrompus seront tombés dans le panneau. De voir la propagande être le dindon de la farce a été d’une grande réjouissance. Un retour de manivelle bien mérité après tant de manipulations de leur part. Surtout cela ravive le grand espoir que cette mystification gigantesque dont le mondialisme a été victime est l’œuvre de forces plus puissantes et plus habiles, des forces en train de prendre l’ascendant. Voilà qui devrait nous regonfler le moral et battre en brèche le défaitisme d’un Crèvecœur.¾

 

Photo d'illustration : Des éléments du groupe PMC Wagner faisant une pause café à Rostov, le 24 juin 2023 à midi avant leur marche qui se voulait triomphale sur Moscou... 

Journalisme de connivence Vladimir Poutine Coup d'Etat Prigojine