Il s’agit bien de sagacité chez de Gaulle, d’autant plus que ce qui nous apparait maintenant comme une évidence ne l’était en rien, de son temps. Commençons donc par lui donner la parole.
GdG : « Les américains font croire que ne pas être d’accord avec eux, c’est vouloir rompre l’Alliance atlantique et mettre en danger la liberté de l’Occident. Cuba leur est monté à la cervelle. En Amérique du Sud, en Europe en Asie, tout le monde en colonne par deux derrière l’oncle Sam, sinon gare à vous ! Ce serait contraire à la solidarité et à la morale ! (Rire.) Voyons Peyrefitte, c’est de la rigolade !
« Les américains veulent faire passer notre armement atomique dans leur « Force multilatérale » sous leur commandement ! Ils prétendent nous la confisquer ! Et maintenant ils racontent que je voudrais obtenir des concessions, que je suis sur le chemin de la négociation, c’est-à-dire de la capitulation ! Eh bien non ! Je ne demande rien, je ne souhaite rien, si ce n’est boire dans mon verre et coucher dans mon lit […] En matière atomique, les Anglais n’ont rien fait qu’avec et par les Américains. Nous avons tout fait sans personne et par nous-mêmes. Les Américains croyaient :
« 1. que nos scientifiques ne seraient pas capables ;
« 2. que nous n’aurions pas les moyens financiers ;
« 3. que de Gaulle allait être contraint de quitter le pouvoir dès qu’ils fronceraient les sourcils Evidemment Guy Mollet ou Félix Gaillard se seraient contentés de quelques paillettes d’intégration ou de communauté atlantique. »
Dans ce passage, l’on retrouve les récriminations habituelles d’un de Gaulle envers les Américains. Notez qu’il n’en reporte pas la faute sur JFK. Loin de là, comme on le voit par la suite. De Gaulle s’interrogera aussi sur son assassinat dix mois plus tard. Non, en réalité, il a dans le viseur le Deep State, ce qu’Eisenhower avait appelé le complexe militaro-industriel. Déjà, selon de Gaulle, il lorgnait sur la bombe atomique française pour se l’accaparer. En vain. Néanmoins il n’a pas dit son dernier mot, puisqu’aujourd’hui une UE qui lui est inféodée complote pour s’emparer de notre force de frappe nucléaire. La grande différence entre les deux époques réside dans le fait que l’un, de Gaulle, n’avait pas l’intention de laisser faire, quand l’autre, Macron, est tout disposé à la livrer. Si de Gaulle s’est souvent insurgé, de son côté Macron consent.
D’autre part, en politique intérieure, de Gaulle ne se fait aucune illusion. La gauche socialiste, de Mollet à Gaillard, trahira pour pactiser avec le Deep State et s’accommoder de ses ultimatums. La gauche socialiste actuelle n’a pas changé. Elle collabore avec les mondialistes outre atlantique, de Hollande à Glucksmann. Toutes les preuves sont là.
Dans les années soixante donc, le seul rempart en France à l’hégémonie de l’élite anglo-saxonne était de Gaulle. En Amérique, le rempart des Kennedy allait s’effondrer en deux temps, en 63 avec la mort de JFK et en 68 avec celle de son frère RFK. Deux morts attribuées désormais à l’élite de pouvoir. A la fin de la décennie, des deux côtés de l’Atlantique, personne ne se dresserait plus contre elle.
De Gaulle, à qui l’on doit tant d’infrastructures et de réalisations technologiques, souligne combien la France ne le devait qu’à elle seule, à sa volonté politique et au talent de ses ingénieurs. A l’époque, non seulement ils se montrèrent à la hauteur des formidables enjeux, mais encore ils avaient le sens du bien commun. Ils n’auraient pas cédé au chant des sirènes des grosses firmes en lien avec Washington. Big Pharma ou Big Steel ne faisait pas encore la loi dans la France de Louis de Funès.
Quant aux moyens financiers, le pays était souverain. Il n’avait pas de dette. Il battait sa monnaie et n’avait pas encore sombré dans le rêve cauchemardesque de Jean Monnet.
Retournons de ce pas dans le salon doré de l’Elysée. Une ambiance au fond pas si feutrée nous y attend. Le Général converse toujours avec son hagiographe.
GdG : « Le grand problème, maintenant que l’affaire d’Algérie est réglée, c’est l’impérialisme américain. Le problème est en nous, parmi nos couches dirigeantes, parmi celles des pays voisins. Il est dans les têtes. »
Quel euphémisme, l’affaire d’Algérie ! Il faudra du temps pour parler de guerre d’Algérie.
Dans ses paroles apparait nettement la position du Général à la fois sur l’extrémisme islamique et sur le vampirisme yankee. Il pense avoir échappé au premier de ces dangers en abandonnant à leur sort les pieds-noirs, pour avoir les mains libres et s’opposer au second. Ce fut certainement un calcul judicieux à court terme, mais pas sur la durée. De Gaulle n’aura pas eu gain de cause dans sa lutte contre l’establishment. Son départ, quelque temps après mai 68, dont il est reconnu par les historiens sérieux que ce fut une révolution colorée, fomentée pour torpiller sa présidence, aura signé le triomphe du Deep State. Le pouvoir profond aura eu raison de de Gaulle.
Et après lui, à partir de Pompidou, venu de la Banque Rothschild où il avait exercé les fonctions de directeur général, ce sera le début de la fin. Et plus personne ne s’opposera à l’Etat profond américain. Ce dernier, via l’UE, jouera ensuite la carte du grand remplacement de la population française par diverses autres populations en provenance d’Afrique. Finalement, sur la durée, de Gaulle aura aussi échoué concernant la première menace qu’il avait cru pouvoir neutraliser, à savoir l’envahissement du territoire métropolitain par des vagues migratoires musulmanes.
De Gaulle confiait déjà, en mars 1959, à Peyrefitte les raisons de son prochain abandon du territoire algérien. Outre l’argument d’antériorité qu’il reconnaissait aux Arabes sur les Français, il ne se leurrait pas sur les difficultés insolubles qu’il y aurait à concilier les deux cultures dans le même espace géographique. Ses propos sont cash ! Les voici.