Pour avoir vécu de l’intérieur la lente mais progressive dégradation de l’Education Nationale, je ne peux que confirmer son diagnostic. Allègement du contenu des programmes, référentiels vidés des notions jugées trop complexes, laxisme dans la notation en particulier aux épreuves du baccalauréat, recrutement en classe de seconde générale d’élèves manifestement bien en-dessous du niveau requis et dont même l’enseignement professionnel ne veut pas… Long, très long et fastidieux serait le passage en revue des décisions prises en toute connaissance de cause à l’origine de l’effondrement de notre école. On ne passe pas réellement de 60 à 95% de réussite au bac en deux ou trois décennies, alors qu’on sombre lamentablement dans les classements internationaux. Le paradoxe aurait dû en alerter plus d’un.
Comme le but est effectivement de torpiller ce qu’il reste de l’Instruction publique de jadis, Macron, pour complaire à ses supérieurs, a tenu à ce que personne n’échappe à ce hachoir culturel. Il a donc interdit l’école à la maison, avec de graves sanctions à la clef pour les parents désobéissants.
A l’avenant, le professeur Omar Aktouf abonde dans le sens de Brighelli. Aktouf enseigne pour sa part à HEC Montréal. Cette conjonction des points de vue venant d’éminents spécialistes devrait faire réfléchir, il me semble, à la justesse de leur constat. Sinon, si les personnes à qui ils s’adressent ne se questionnaient pas après ça, cela ne ferait qu’amplifier le bien-fondé de leur discours.
Un petit bémol, pour Aktouf, le système éducatif formerait plutôt trois types d’employables. Cela ne se limiterait pas au seul cas du Canada. Au niveau le plus élevé, on formerait des technocrates destinés à analyser les problèmes. Leur tâche ne consisterait pas à faire preuve d’intelligence. Pour lui, l’intelligence consiste à savoir poser les problèmes, non nécessairement les résoudre. Ces technocrates-là analysent donc les problèmes et appliquent les solutions que leurs études leur ont dictées en pareil cas. On reconnait là les « bons » médecins qui ont suivi à la lettre, sans réflexion aucune et sans recherche approfondie, la politique covid pour soigner leurs patients ou plutôt pour ne pas les soigner. Voilà pourquoi l’opération covid a si bien réussi. Voilà aussi pourquoi ces rejetons du système en viennent à prendre des décisions stéréotypées sans état d’âme, parce que tout simplement elles s’imposent à eux de par leurs études.
Le niveau de formation intermédiaire s’attache quant à lui à former des techniciens. Selon Aktouf, ces techniciens seraient plutôt des servants de machines, tant ils dépendent d’elles. Maintenant avec l’IA, leur assurant qu’elle sait mieux qu’eux-mêmes et qu’elle est là pour agir à leur place, ce ne sont pas ces techniciens qui lui contesteront la primauté. « Ils sont là pour que la mécanique automatisée de production ne tombe jamais en panne. » C’est leur fonction principale. « Tout ce qu’on leur demande comme connaissance c’est la logique de la machine. » Et on leur demande d’être à l’écoute de la machine et de ses besoins. « Ce ne sont plus eux qui dominent la machine… c’est la machine qui dit : si tu es assez intelligent, voilà ce qui cloche. »
Enfin, au niveau inférieur, on ne forme plus. Ces gens seront voués à devenir de simples opérateurs. Ainsi « 45% de la main d’œuvre des multinationales américaines, en particulier, sont totalement analphabètes ! Et les multinationales ne veulent pas que ça change. » On retrouve encore l’intérêt des corporations, celles-là mêmes dont l’oligarchie préside la destinée.
« Les diplômés du primaire et du secondaire aux Etats-Unis sont analphabètes », s’accorde-t-il à dire. Ce qui rejoint le fait qu’ici, en France, nous en sommes arrivés à un bac au rabais. Un bac bradé, bientôt un bac pour analphabètes. « Ils ne savent ni lire ni écrire, mais ils ont un diplôme. » C’est trait pour trait ce qu’on observe en France aussi. Qui plus est, les parents s’en réjouissent. Que demande le peuple ! On le flatte et ça marche. Le peuple ne veut pas voir la supercherie. Il préfère croire au génie de sa progéniture. Or, hélas, ce génie est analphabète ! Voilà la vérité. Les petits n’auront obtenu leur diplôme que par la présence et par l’âge. On les affublera d’une mention au besoin. Les mentions au bac sont ainsi passées de deux à trois par classe dans les années 70 à plus d’une vingtaine trente ans plus tard. Vaste fumisterie ! Aktouf n’hésite pas à qualifier ces opérateurs de « bipèdes quasi décérébrés ». Il a certes la dent dure. Mais ce qui l’insupporte, c’est que ces opérateurs défendront bec et ongles ce système qui les broie.
De ce tableau du corps social en pleine décomposition par l’entremise du système éducatif, je retiendrai la facette la plus glauque, l’intégration d’une éducation sexuelle dénaturée dans les programmes scolaires, de la maternelle au lycée. Dorénavant, en fréquentant les écoles françaises, un enfant aura ingurgité sur le sujet 28 séances en maternelle, 35 en élémentaire et d’ici la fin du lycée près de 112 ! Où on lui aura parlé gaiment de fellation, de masturbation, de changement de genre et de toutes les luxures possibles et imaginables, afin d’élargir son horizon, je suppose. On est loin de St Preux et de la nouvelle Héloïse. Cette dernière aujourd’hui, guère plus avancée dans ses sentiments, saurait tout du sexe en revanche, mieux qu’une putain. Et St Preux serait son mac.