Dans un article intitulé Dissimulations, en date du 12 avril 2023, j’évoquais déjà le sujet en abordant comment avait été perpétré l’assassinat de JFK par l’Etat profond américain et comment ce dernier avait dissimulé son crime. En fait, avec la Commission Warren, nous avons une sérieuse piste pour l’incriminer. Tous ses membres, les sept qui la composèrent, furent des représentants du Deep State de l’époque, des amis de Lyndon Baines Johnson, et surtout le triumvirat formé par John McCloy, Gerald Ford et Allen Dulles. La commission fut nommée par LBJ (tout comme celle du 11 septembre le fut par Bush) et chargée de promouvoir la version officielle du tireur solitaire, Lee Harvey Oswald, en dépit de tous les éléments contradictoires qui allaient l’infirmer. Une commission que d’aucuns nommeront la Commission Dulles, tant l’ancien directeur de la CIA avait pouvoir sur elle (même après son licenciement) et des motifs de couvrir les auteurs du crime, sans parler de son ressentiment pour JFK qui venait de le limoger. Et l’écrivain James Douglass de renchérir : « la transcription de la réunion du 27 janvier 1964 révèle comment Allen Dulles, l’un des principaux instigateurs de la guerre froide et pour lequel les mobiles de l’assassinat de Kennedy ne manquaient pas, conduisit avec une déconcertante facilité, un tel cénacle de gens honorables et avisés vers le mensonge et la dissimulation ». Parmi les sept membres de la Commission Warren, on compta même Arlen Specter, l’inventeur de la fumeuse théorie de la balle magique, raisonnement alambiqué destiné à éliminer toute autre version que celle du tueur unique, posté au sixième niveau du Dépôt de livres scolaires du Texas et visant de l’arrière de la Lincoln présidentielle après son passage. Voilà bien une théorie rocambolesque, qui n’a pas manqué, à juste titre, de détracteurs et qui pourtant fut imposée au public. La similitude entre le recours à une balle magique et le fait qu’on ait soi-disant retrouvé intacts dans les décombres du World Trade Center les papiers d’identité des pirates de l’air du 11 septembre est frappante. Là encore, la théorie officielle est intenable et ses meilleures preuves sont invraisemblables. Et, gare à toute personne, qui le dénonce ! C’est lui le théoricien de la conspiration. Extraordinaire dialectique du renversement des valeurs !
Le public américain eut le grand tort de se résigner devant cette version cousue de fil. Il savait au fond que ce n’était qu’une histoire à dormir debout. Tout comme celle qu’on nous a racontée à propos des terroristes et de la chute des tours new-yorkaises qu’ils auraient provoquée.
Quant à Warren, le Chef de la Cour Suprême, il se fit tirer l’oreille pour accepter de présider la Commission. Il savait quelle farce ce serait. Et ce le fut. En l’acceptant, il serait la caution morale de ce ramassis de notables aux conflits d’intérêts longs comme le bras. C’est tout ce qu’on lui demandait. Et c’est tout ce qu’il fit.
En ce qui concerne les sept membres, cinq au moins avaient de sérieux liens avec le CFR. Allen Dulles l’avait dirigé juste après la guerre. John McCloy, diplomate et banquier, surnommé le président de l’establishment pour son alignement sur les Rockefeller, l’avait quant à lui présidé de 1954 à 1970, avant de laisser la place à David Rockefeller, l’héritier. Quant à Gerald Ford, il choisit Nelson Rockefeller comme vice-président lors de son accession à la Maison Blanche. Enfin Arlen Specter était un protégé de Gerald Ford, et John Cooper de Lyndon Johnson.
Le Deep State, au plus haut niveau, avait très probablement commandité le meurtre du Président. Seule la CIA, son bras armé, avait les capacités de l’organiser, sous la férule de son âme damnée et créateur, Allen Dulles. Dulles faisait la liaison. Ce n’était pas la première fois du reste qu’elle aurait la peau d’un dirigeant gênant pour elle. L’Agence avait déjà tant pratiqué l’assassinat sous sa direction. Une cellule secrète sous l’autorité d’Angleton existait, qui se chargeait des assassinats. « Lorsqu'il s'agissait d'entreprendre des missions secrètes, nous dit David Talbot, Allen Dulles était un acteur audacieux et décisif. Mais il n’agissait qu’après avoir estimé qu’un consensus s’était dégagé au sein de son réseau d’influence. L’un des principaux cénacles où ce consensus a pris forme a été le CFR. Les frères Dulles et leur cercle de Wall Street dominaient ce bastion privé de l’élaboration des politiques publiques depuis les années 1920. »
Dulles osa affirmer non sans un certain aplomb que ni les employés de la CIA ni ceux du FBI n’étaient tenus de dire la vérité devant la Commission Warren. Un comble et un aveu ! Etant juge et partie, ce n’était pas lui qui aurait mentionné que Lee Harvey Oswald, connu de la CIA pour être un des leurs, était suivi par plusieurs agents de la maison, dont un directement lié à Dulles. Au début des années soixante, après la mort de son frère Forster en 1959, Allen se retrouva seul avec ses griefs contre Kennedy, griefs qu’il partageait avec les grands pontes de l’industrie, de l’armée et de la finance. JFK avait trop contrarié les magnats de l’acier ou les huiles du Pentagone. Son rapprochement avec les régimes communistes et sa volonté de se désengager de la guerre du Vietnam avaient fait de lui leur ennemi juré. Ainsi des abîmes d’incompréhension s’étaient creusés entre les Rockefeller et Kennedy. La politique étrangère comme la politique intérieure du Président s’avérait au fil des mois une menace existentielle pour eux. Et l’on sait quel parti prit Allen Dulles. Très proche des Rockefeller, qui ne lui refusaient rien, Dulles les tenait informés en temps réel des dessous de la situation internationale. La décision a donc très bien pu se prendre au niveau du CFR et le consensus, dont parle Talbot, n’a pas dû être long à trouver pour décider d’abattre le Président, avant que Dulles n’offre ses services en tant que meilleur connaisseur des mauvais coups et des opérations secrètes. Et puis, on ne peut pas dire que Dulles ait jamais eu beaucoup de considération pour les présidents qu’il était censé servir, encore moins pour JFK. Il n’avait que mépris pour leurs directives comme pour celles du Congrès d’ailleurs. Pour le jeu démocratique en général. Il se sentait très au-dessus et prenait le personnel politique de haut. Dans le cas de JFK, il devait ressentir, au-delà du mépris, une vive animosité. Du reste, il le disait lui-même, les hommes politiques ne voulaient rien savoir des opérations clandestines que la CIA mettait sur pied au nom du gouvernement, comme les éliminations de figures politiques notoires. Indiquant combien il lui semblait que Dulles avait le profil du commanditaire, Talbot écrit : « Dulles était le seul homme à la stature, aux relations et à la trempe suffisante pour réaliser quelque chose d’aussi énorme ». Sous-entendu, que l’assassinat de JFK. « Tout ce que ses collègues de l’establishment avait à faire était de regarder ailleurs. » On ne peut pas être plus clair. Dulles était le mieux placé pour être la cheville ouvrière aussi bien que le représentant des Rockefeller et consorts.