Dans le conflit israélo-arabe qui s’invitait à la table des grands dans ces années d’après-guerre, Gandhi montra très vite son opposition au sionisme et sa propension à caresser le monde arabe dans le sens du poil. Il a ainsi l’aplomb d’affirmer que « la Palestine appartient aux Arabes » sans la moindre justification. Et il poursuit : « Il est erroné et inhumain d’imposer les Juifs aux Arabes. Ce serait certainement un crime contre l’humanité de réduire le nombre de fiers Arabes afin que la Palestine soit restituée aux Juifs en partie ou en totalité comme leur patrie nationale. »
Toutes ces circonvolutions méritent une explication de texte, tant elles sont effarantes. Au point qu’on peut se demander, au détour de chaque ligne, si on a bien saisi ce qu’a voulu dire l’auteur. Pour lui, il serait carrément « inhumain » d’imposer les Juifs aux Arabes ; en revanche de demander aux premiers de se jeter à la mer, c’était tout à fait « humain » ! De plus, qu’il y ait un foyer national juif en Palestine constituerait rien de moins qu’« un crime contre l’humanité » mais pas la Shoah. Il n’a en effet jamais qualifié l’holocauste de crime contre l’humanité. Dans le même paragraphe, il se montre intransigeant contre la volonté des Juifs à refonder leur patrie en Palestine, tout en reconnaissant à la fin leur légitimité à occuper cette terre, puisqu’il parle de restitution de la Palestine aux Juifs. La contradiction ne l’a pas effleuré, semble-t-il. D’ailleurs Grumberg rappelle que « Gandhi le pacifiste n’ignore pas que les Arabes ont envahi la Palestine juive par la force et la guerre ». Alors question subsidiaire : pourquoi ne demande-t-il pas cette fois aux Arabes de se jeter à la mer ? Pourquoi serait-ce toujours aux Juifs, pour reprendre son expression, d’éprouver la souffrance volontaire et non aux Arabes. Mystère, si ce n’est parce que, chez le prétendu sage, un antisémitisme larvé est à l’œuvre. Au point de ne même pas accepter l’idée d’un partage du territoire entre les deux parties ! Comme par hasard, dans le conflit entre britanniques et nazis, il prodiguera aux sujets de sa Majesté le même « conseil » qu’aux Juifs. Il faut dire que son combat contre la présence coloniale britannique en Inde constituait une bonne raison de les voir disparaitre eux aussi. Grumberg résume tout ça clairement : « Ainsi donc aux Allemands il explique que si l’on voulait persécuter leur race entière, la guerre à laquelle il ne croit pas serait dans ce cas exceptionnellement justifiable, tandis qu’il demande aux Juifs et aux Anglais de se laisser massacrer par Hitler… parce que la guerre n’est pas justifiable. » Et pour finir sur ce thème, Grumberg ajoute en faisant un clin d’œil à l’actualité : « Ce que Gandhi n’a pas réalisé, et qu’expliquait Churchill lorsqu’il déclara devant le parlement britannique qu’on ne raisonne pas avec le tigre quand votre tête est dans sa gueule, c’est que lorsqu’on a affaire à un gouvernement un peu compatissant, un peu moral, la résistance pacifiste a sa place. Mais lorsqu’il s’agit de barbares meurtriers tels que l’Etat islamique ou les nazis, aucun niveau de résistance pacifiste ne les fera changer d’avis ».
D’autres textes de Gandhi pourraient faire l’objet de nouvelles et cruelles désillusions, mais pour cela je vous renvoie à l’article de Grumberg sur Dreuz.info du 20 mars 20181. Ce que je retiens c’est que je ne verrai plus Gandhi du même œil. Je n’ai pas non plus l’intention de m’étendre sur les frasques sexuelles du Mahatma (« grande âme ») qui ont soulevé beaucoup d’interrogations. Avec sa langue de bois très humaine et qui n’a rien d’artificiel, l’IA Perplexity les juge profondément problématiques et troublantes. Au bout du compte, c’est Churchill, avec son sens de la formule, qui avait encore raison : loin d’être une grande âme, Gandhi avait davantage du « fakir à demi-nu ».
S’il doit y avoir une conclusion laconique à cette débauche d’impostures entretenue par nos livres d’histoire bien déficients, c’est qu’il est temps de voir la réalité en face. Ce sera le meilleur moyen de saper tous les totalitarismes, leurs faux-semblants et leurs faux héros.■
1 https://www.dreuz.info/2025/11/et-si-lon-nous-avait-legerement-menti-sur-la-saintete-de-gandhi-comme-on-nous-a-menti-sur-tant-de-choses-159021.html
Photo d'illustration : Grok